Sous la direction de Jean-François Marmion, avec Jean-Claude Carrière, Boris Cyrulnik, Antonio Damasio, Howard Gardner, Alison Gopnik, Daniel Kahneman, Tobie Nathan, Emmanuelle Piquet, etc... aux Editions Sciences Humaines. Octobre 2018. Pages : 378. Prix : 18 euros.

     Que voilà donc un livre sublime ! Une trentaine d'auteur(e)s, par de petits textes ou des interviews, analyse la "connerie" de manière à la fois sérieuse et souvent humoristique. Toujours argumenté, avec des expériences ou tout simplement par l'observation de ce qui se passe autour de nous, cet ouvrage nous emmène dans les méandres du cerveau et nous explique par exemple qu'en réalité nous en avons deux qui se battent l'un contre l'autre ("Thatcher contre le Che" dit l'un des auteurs...), ainsi que deux modes de réflexion : 1) celui qui caricature et bâcle, 2) celui qui déteste l'emporte-pièce, mais au final "la qualité se paye", aussi quand on veut bien raisonner on peut, mais souvent on ne veut guère ! (d'après Jean-François Marmion)).
     Nous y apprenons, et ce n'est pas une surprise, que "nous sommes tous des cons en puissance. Mais (que) certains courent plus de risques que d'autres (...)", qu'il y a des "p'tits cons" et des "vieux cons", des "cons de compétition", des connards(nasses) vulgaires, brutaux(ales), racistes, homophobes, et que la connerie sévit autant chez les gens instruits, les prix Nobel et autres, que chez les compagnons du comptoir du coin, et ce, même si moins on a de connaissances plus on a souvent de convictions (convictions et connerie allant très bien ensemble). Suivons donc Ewa Drozda-Senkowska "(...) la connerie, la vraie, c'est cette effrayante suffisance intellectuelle qui ne laisse absolument aucune place au doute."
     Le rôle des biais cognitifs, des réseaux sociaux (dont l'anonymat permet à la connerie de fleurir par la sauvagerie des commentaires), les erreurs collectives, cette espèce animale qui ose tout, l'humain... etc. sont étudiés en détail.
     Et les enfants là dedans ? Seraient-ils moins cons que les adultes ? Alison Gopnik tente de nous éclairer sur ce sujet : "Ils actualisent plus facilement leurs hypothèses ou leurs croyances que les adultes, qui se reposent davantage sur leurs acquis." Donc oui, semble-t-il !
     Serge Ciccotti nous propose une expérience facile à réaliser : "il suffit de crier "pauvre con" dans la rue pour que tout le monde se retourne !". Bien vu. Stacey Callahan nous rassure "La connerie est inévitable, car nous sommes tous des êtres humains" tandis qu'un autre auteur nous démontre que si la connerie a échappé à la sélection naturelle c'est probablement parce qu'elle est utile. Ouf !

     Excellent ! Pour tous, principalement les cons... (au moins occasionnels) moi compris bien sûr (et d'ailleurs ça y est, j'ai lu ) !
     Mais n'oublions pas un risque aujourd'hui, indiqué par Jean-François Marmion :
"La nouveauté de l'époque contemporaine, malgré tout, c'est qu'il suffit d'un con et d'un bouton rouge pour éradiquer la connerie et le monde tout entier avec" .